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Chacun garde en mémoire le tragique accident survenu sur les routes du Tour de Suisse et qui a coûté la vie à Gino Mäder. Une jeune victime de plus, qui s’ajoute à la liste des athlètes décédés dans le feu de leur passion. Chacun s’interroge sur les causes du drame. Erreur humaine ? Défaillance technique ? Fatalité ? Quel que soit son origine, un talent est mort dans un accident qui interpelle quant à la prise de risques des athlètes dans l’exercice de leur art.
Plus vite, plus haut, plus fort ! Prise à la lettre, la devise exhorte l’athlète à atteindre ses limites, les dépasser même. Une quête d’excellence qui peut se révéler dangereuse, lorsque la seule fin justifie les moyens. Des pièges, mortels parfois, jalonnent et collent à des disciplines, certes spectaculaires, mais dangereuses, appelant une attention de tous les instants, une prise de risque. Or, à l’écoute d’athlètes aguerris à cette adrénaline, il s’avère, justement, que l’on ne prend pas de risque. On le calcule. Nuance !
Jusqu’où performer ? A quel instant lever le pied, s’interroger, prendre le temps du choix d’une autre stratégie ? Une décision difficile, un renoncement parfois aux portes de la victoire, mais qui vaut son pesant de vie.
Car, prendre le risque, c’est se mettre en danger, franchir une ligne rouge, poser le pied dans un espace où l’on ne maîtrise plus l’ensemble des paramètres et pire encore, où l’on accorde, sciemment, à l’aléatoire sa part de décision. Calculer le risque n’est pas renoncer, mais accepter, que pour franchir ce palier, cette limite, une somme de travail, d’entraînement seront encore requises pour progresser en toute sécurité.
Voisine du risque, la peur. Les fanfarons le proclament : « Même pas peur ! » Les survivants les corrigeront : « La peur est bonne conseillère. Ecoute-la ! » Des champions et non les moindres affirment avoir peur et ne s’en offusquent pas. Elle les accompagne, vigilante, prête à les enjoindre, à les commander à renoncer, à patienter, à attendre le bon moment, une meilleure météo, le prochain virage, une condition physique retrouvée. Avoir peur, c’est, en conscience, mesurer jusqu’où ne pas aller, hormis la malédiction, la fatalité qui échappent à l’entendement.
Une prise de risque peut payer. C’est une évidence dont il faut, certes, se méfier et à ranger dans le rayon « coup de bol ». En retour, elle peut, tout aussi bien adresser sa propre facture. A régler cash.
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