L’histoire se répète. Début mai, le Ministre des Sports de la Fédération de Russie, Oleg Matytsin, informe sa hiérarchie de son projet d’organiser son propre calendrier de compétitions internationales. Vu le contexte actuel, on comprend sa frustration et celle de toute une élite d’athlètes condamnée à « chauffer le banc », faute de pouvoir participer aux événements. L’élu plancherait sur des World Friendship Games, des Jeux de la Bonne Volonté, l’an prochain, aussitôt éteinte la flamme des JO de Paris 2024.
Rien de bien nouveau dans cette idée, dans la mesure où on réchauffe une soupe touillée une première fois en …1986, puis abandonnée, louche comprise en 2001. Petit rappel pour Monsieur le Ministre.
En 1980, sur fond de fortes tensions Est-Ouest et comme pour mettre de l’huile sur le feu, le CIO fait le choix des deux pôles les plus antagonistes du moment, pour organiser ses Jeux: en hiver aux USA, à Lake Placid, en été en URSS, à Moscou. Or, 1980 c’est une année après l’invasion soviétique de l’Afghanistan ! Résultat, les joutes d’été moscovites se déroulent sans les USA. Ping ! Et pong quatre ans plus tard à Los Angeles (USA), l’URSS et la plupart de ses satellites restent à la datcha.
Une Bonne Volonté se manifeste alors sous la forme de Jeux du même nom, une initiative philanthropo-médiatique, que l’on doit à Ted Turner, alors patron de CNN à Atlanta. Cette parenthèse attentionnée fonctionnera durant cinq éditions estivales de Goodwill Games, soit Moscou en 1986, Seattle (USA) en 1990, Saint-Pétersbourg (RUS) en 1994, New-York (USA) en 1998 et à Brisbane (AUS) en 2001. Les seuls Goodwill Games d’hiver seront ceux de Lake Placid (USA) en 1980. Les éditions de 2005 (Phoenix (USA) et Calgary (CAN) sont abandonnées faute de retour médiatique.
Bis repetitas donc. Mais pas tout à fait. En pleine guerre froide des années 80, c’est une initiative privée qui se sert du sport pour apaiser et dépasser un antagonisme politique. En 2023, c’est tout le contraire. C’est une main politique, celle d’un Ministre en l’occurrence, qui tente d’utiliser le levier du sport pour masquer les vraies raisons de sa frustration.