La Jonchère (SUI), le 12 septembre 2017 : Tensions, fusions, restructurations, la presse romande, titres et journalistes compris, vit des heures difficiles. De Zurich à Berlin, de Zofingen à Paris, les éditeurs font leurs comptes et prennent les décisions inspirées du seul compte de pertes & profits. Rationnel, cruel certes, mais un peu court et surtout surprenant de la part de managers pourtant réputés visionnaires en marketing médiatique, dont on attend un regard portant un poil plus loin que leurs rotatives.
Ces décideurs réduisent la voilure, fusionnent les contenus, taillent dans les effectifs pour, plaident-ils, retrouver la croissance, les chiffres noires. Faire plus, mais avec moins. On marche sur la tête. Imaginez un instant le plus grand génie militaire à qui on demande de gagner la guerre, tout en lui retirant ses chars et son aviation.
Revenons sur le terrain du marketing et rappelons à ces décideurs les principes de base qui régissent cette science, des vérités contenues en page une du cours numéro un, leçon une, intitulée : De l’offre et de la demande. Les ventes baissent. Et pourquoi ces chutes du lectorat ? Comme l’âne qui ne boit pas quand il n’a pas soif, le lecteur n’achètera pas un journal qu’il n’a pas envie de lire, de consulter.
L’offre ne répond pas ou plus à la demande. Ne cherchons pas midi à quatorze heures. La faute à qui ? La TSF, la radio de nos arrières grands-pères, devait tuer la presse écrite, la télévision se faire la peau de la radio, internet avaler tout cru la télévision.
Il y a un problème, c’est une évidence. La presse écrite accuse un coup de mou et doit se réinventer. Mais pas à coups de licenciements. Elle doit au contraire booster ses effectifs, décupler ses forces et imaginations. Dans un registre plus sportif, si Ferrari ne gagne plus, son management ne va pas réduire ni ses mécaniciens, ni la puissance de ses moteurs.
On s’interroge à juste titre sur le bienfondé de ces décisions qui affectent la presse romande, dans laquelle on comptera bientôt plus de chefs que d’indiens. Il y a urgence de s’interroger sur la véritable demande du marché, des attentes des lecteurs et redessiner les pages de nos quotidiens. Une presse de qualité a un coût. C’est aux lecteurs, pas aux journalistes d’en payer le prix.