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Accréditations des journalistes sportifs
Vendredi, 23 juin 2023

Selon les dispositions régissant le processus d’accréditations des journalistes souhaitant ‘couvrir’ les rencontres de la Super League du football suisse (SFL), la carte professionnelle de presse demeure certes recommandée, mais n’est plus formellement requise. En effet, selon l’article 2.1 dudit processus d’accréditation, il est stipulé que la requête sera recevable si le ou la candidate a « …aussi une raison crédible de couvrir l’événement pour un organe de presse reconnu ».

Afin que tout le monde comprenne bien, imaginez que notre très sérieuse compagnie aérienne Swiss, recrutant ses futurs commandants de bord, les informe qu’un brevet de pilote n’est pas absolument nécessaire et que des exceptions sont tolérées. Des pilotes sans permis ? Nous, on vous souhaite un bon vol, ou une belle envolée, si vous êtes à bord d’Air Canada !

Dans ces deux cas de figure, une question vient immédiatement à l’esprit : A quoi servent donc un brevet de pilote, une carte de presse ?

En première lecture, on pourrait se poser la question, mais la disposition de la SFL cache une réalité plus subtile, plus fine, si l’on prend la peine de s’y arrêter un court instant.

Le journalisme : un métier

Les uns qualifieront la mesure de la SFL de gifle infligée à celles et ceux qui ont fait du journalisme sportif leur métier et consacré les mois et les années à son apprentissage. Et de nous rappeler au passage, qu’un si un brevet est exigé pour les joueurs, les coaches, les arbitres, pourquoi ne le serait-il pas pour la presse ?

Le journalisme est un métier, avec ses règles, son éthique, que la femme ou l’homme qui l’exerce  s’engage à suivre, en usant des droits de liberté de la presse et des obligations qui en découlent. Un métier qui s’apprend, en classe, comme sur le terrain. Comme n’importe quelle profession. Ne pas prendre en considération le contenu de cet apprentissage, c’est, selon certaines voix,  un premier pas vers un appauvrissement de la qualité de l’analyse sportive. Une exception, certes, existe pour les plus anciens dans le métier pour qui, faute d’accès à une formation, les années ont remplacé les bancs d’école, durci le cuir et affuté la plume et la verve, ajusté l’objectif.   

Après les évolutions, la révolution.

Le métier du journalisme, comme la presse dans son intégralité, vit une mutation structurelle, identitaire même, plus significative que les récentes évolutions, les passages successifs du papier à la TSF, de la radio à la télévision. Au milieu des années 90, l’Internet et ses synapses, les réseaux sociaux, ont changé la donne. Chacune et chacun peut aujourd’hui se réclamer du label journalistique, en pilotant son propre blog et figurer dans le kiosque à journaux de la grande Toile, entre le Washington Post et l’Asahi Shimbun, pour ne citer que ces deux géants de la presse internationale.

Le média, ce véhicule de l’information, a, en quelques années, explosé la diversité de ses  vecteurs, changé notre  mode de consommation de ladite information, bousculé les standards et les habitudes. Parmi ces modèles réputés intouchables, le journaliste voit aujourd’hui son statut chahuté, remis en question. Une réalité nouvelle qui nous renvoie aux dispositions du football suisse, en termes d’accréditations.

Questions de choix!

Les mœurs changent, évoluent, mais les fondamentaux demeurent. Entre de mauvaises mains, le stylo, le microphone, la caméra sont autant d’outils destructeurs.  Dans cette perspective, comme l’habit ne fait pas le moine, la carte de presse ne fait pas forcément le journaliste. Bien des titulaires ne mérite pas ce sésame, en l’utilisant sans en connaître les règles, ou pour d’autres fins que celles pour qui il est destiné. Aussi, comme pour le maçon, dont on reconnaît le savoir-faire truelle et taloche en mains devant le mur, appartiendra-t-il désormais aux journalistes de démontrer par l’acte et les références dont ils ou elles se réclament, tout à la fois le talent qui est le leur et l’incarnation du métier qu’ils et elles entendent exercer.

Aussi, ne jettera-t-on pas la pierre à la SFL, en l’invitant toutefois à rendre les chargés de presse des clubs attentifs à ces mutations et, en l’absence de carte de presse, de bien peser la pertinence de chaque demande d’accréditation. Cela étant, une réalité émerge de cette annonce, la carte de presse, dans son modèle actuel et à l'échelle nationale, vit ses derniers instants.

A l'international, le "sésame" est requis de manière impérative. Les candidates et candidats sont avertis. Chaque accréditation est dûment vérifiée.selon les critères de l'AIPS, l'Assocation Internationale de la Presse Sportive, laquelle exige une certification nationale, soit une carte de presse suisse pour les journalistes helvètes.  En d'autres termes, celles et ceux qui seront assis, sans ladite carte, dans les tribunes de la SFL, n'ont aucune chance de vivre un événement  intternational de la tribune de presse. 

Mesdames et Messieurs les journalistes, à vous de choisir!

 

Type d'article: 
Culture - Politique - Loisirs (société)