La Jonchère (SUI), le 15 avril 2017 : L’association Sportaccord, basée à Lausanne, la plus grande enseigne autour de laquelle gravite tout ce que le sport compte de gestionnaires, de dirigeants, de partenaires, de fédérations, vient de tenir son assemblée générale 2017 à Aharus (DEN). Au nombre des décisions annoncées, la modification de sa raison sociale n’est pas passée inaperçue aux yeux de celles et ceux qui suivent de près les ondulations du microcosme sportif international.
Sportaccord se nommera désormais, dans son appellation officielle anglaise, Global Association of International Sports Federations, soit GAISF pour l’acronyme. Traduit en français, cela donne Association Globale des Fédérations Internationales de Sports, AGFIS.
Oui, et alors ?
Par un tour de passe-passe, l’association retrouve le nom qu’elle portait ….à sa fondation en 1967 et jusqu’au coup d’état de 2009, ourdi par le camp des modernes d’alors, bien décidés à tirer un trait sur un passé récent et chaotique.
Explications.
La création en 1967 de l’AGFIS, alors Assemblé Générale des Fédérations Internationales de Sports, répondait à la volonté de créer un interlocuteur fort et crédible face la toute-puissance du CIO. Elle y est parvenue grâce aux talents de ses pairs fondateurs et surtout à l’un d’entre eux, le suisse Thomas Keller, qui en sera le président de 1969, jusqu’à son décès brutal en 1989. Sous sa présidence, la Direction de l’AGFIS est assumée jusqu’en 1982 par le Dr Luc Niggli, père d’Olivier, le Directeur général actuel de l’AMA, Agence Mondiale Antidopage
Ah le sport ! Vaste monde et petit verger, où le fruit ne tombe jamais bien loin de l’arbre !
Le coup de force !
Suite au décès subit de son leader, l’AGFIS, basée à Monaco depuis 1977, est ensuite présidée par le coréen Un Yong Kim (WTF). Si le Suisse Keller était un président en or, son successeur fut lui …en "tôle", car on ne retiendra de sa gouvernance que son emprisonnement à Séoul, en 2004, pour corruption ! Passons.
Cela étant, dès 2003 déjà, les organismes faîtiers des fédérations internationales olympiques d’été et d’hiver notamment, réclament une plateforme unique, susceptible de rassembler et d’unir, de mener, de poursuivre des objectifs d’intérêts communs, mais aussi d’arrêter une date, un rendez-vous dans l’année que toutes entités sportives seraient capables d’honorer, pour y tenir leurs assemblées générales respectives. Le nom de Sportaccord apparaît alors pour la première fois dans les procès-verbaux. La même année, Madrid accueille la première Convention de Sportaccord. Le projet est sur les rails mais une révolution reste encore à faire.
En 2004, exit donc d’Un Yong Kim. Sans président l’AGFIS est alors confiée à titre intérimaire à son numéro deux, Hein Verbruggen (UCI). Pour l’AGFIS c’est le début d’une fin programmée.
Homme d’affaires avisé, le néerlandais a son plan et une vision du sport qui dépasse largement le cadre purement sportif. Il soutient le projet initié en 2003 d’une organisation contrôlant tout ce que le sport génère d’activités dans le monde, des fédérations internationales aux industries, aux dirigeants politiques, fabricants, villes hôtes, chaînes de télévisions, groupes de médias, cabinets conseils. La liste n’est pas exhaustive. Il tient son projet et affine sa stratégie. C’est aussi un publicitaire, un homme de communication.
En 2004, c’est aussi la retraite du Directeur général de l’AGFIS, Jean-Claude Schupp, la dernière amarre du bateau amiral dans le port monégasque. Hein Verbruggen le sait et le fait savoir à la nouvelle Directrice, Christine Dominguez, laquelle sent que les vents sont aux changements. Le néerlandais s’entoure d’une nouvelle équipe, se hâte lentement pour organiser en douceur la transition de l’AGFIS vers Sportaccord.
En mars 2009, à Denver (USA), la bombe explose aux visages des participants à la 43ème Assemblée générale statutaire de l’AGFIS, la dernière sous ce libellé.
C’est le choc. Les délégués avalent une à une sur grands écrans panoramiques les diapositives du plan Verbruggen et assistent, liquéfiés, à la fin d’un monde dans lequel chacun avait patiemment bâti sa chapelle. Malin, brillant, le tribun séduit, convainc et retourne une assemblée totalement acquise à sa cause. Sportaccord est né. La révolution, initiée en 2003, est consommée.
La nouvelle fait le tour de la planète sport. Elle sonne comme un renouveau, un saut dans la modernité et ouvre la porte aux professionnels de tous bords. A Monaco, on n’apprécie que modérément la fin de l’AGFIS et le transfert de ses archives à Lausanne, dans les bureaux de Sportaccord de la Maison du Sport International. Le courroux princier est perceptible.
Et la vie continue.
La bourde
Le 20 avril 2015, à Sotchi (RUS), au cours d’une assemblée générale de Sportaccord dont tout le monde se souviendra longtemps, son Président Marius Vizer provoque à lui seul un tremblement de terre, en qualifiant le CIO de « dépassé » et de « pas du tout transparent » ! Les membres présents manquent tout à coup d’air. C’est un tollé, une bronca à l’issue de laquelle 17 fédérations et pas des moindre quittent Sportaccord sine die. Un mois plus tard, le pauvre Vizer rend son tablier. Au CIO, on boit du petit lait.
Après une Convention transitoire en 2016 à Lausanne, Sportaccord revient à ses premières amours et retrouve le patronyme qui fut le sien à sa naissance. C’est tant mieux pour une institution qui peut désormais déployer la grande voile et franchir vent arrière les défis planétaires qui attendent le sport sur les terrains de la gouvernance, du crime organisé, de l’environnement et lui permettre d’assumer ses responsabilités socioéconomiques tout aussi planétaire !